L’oiseau 2021 élu par BirdLife est une petite chouette aux yeux jaunes perçants. Longtemps menacée d’extinction, elle opère néanmoins un retour encourageant grâce à de nombreux programmes de conservation.
MŒURS CRÉPUSCULAIRES
C’est un petit rapace à peine plus gros que la taille du poing, au plumage brun tacheté et aux yeux jaunes très expressifs. Oiseau nocturne aux mœurs crépusculaires, on peut l’entendre hululer tôt le matin ou juste avant la tombée de la nuit. Mais mieux vaut s’armer de patience pour qui souhaite l’observer, car la chevêche d’Athéna se fait à la fois rare et discrète. Au bord de l’extinction il y a vingt ans, elle regagne néanmoins peu à peu du terrain. D’une soixantaine de couples recensés au début des années 2000, l’espèce comptait 149 mâles chanteurs en 2020. Un retour certes timide, mais encourageant, rendu possible grâce aux nombreux efforts engagés par BirdLife et ses partenaires dans les différents programmes de conservation. «Ses effectifs sont toute fois encore insuffisants pour garantir sa survie à terme dans notre pays», constate l’association de protection de l’avifaune. En l’élisant Oiseau de l’année 2021, BirdLife tient ainsi à lui donner de la visibilité et à rappeler l’importance de mieux préserver son habitat.
EN QUÊTE DE VIEUX ARBRES
Enseignant de biologie aujourd’hui à la retraite et passionné d’ornithologie, Pierre Alain Ravussin a eu la chance d’observer cet oiseau rare à plusieurs reprises. «La chevêche d’Athéna n’évolue pas dans le milieu forestier, mais dans les espaces ouverts. En Suisse romande, elle est surtout présente dans la campagne genevoise, qui compte près de 70 territoires, ainsi qu’en Ajoie, où les recensements en ont dénombré une quarantaine. Quelques spécimens sont également installés dans les plaines du Tessin et la région des Trois-Lacs. Un territoire accueille généralement un couple, formé après l’hiver et amené à durer jusqu’à la reproduction, qui se déroule au printemps dans les cavités des vieux arbres», explique le spécialiste.
SYMBOLE DE SAGESSE
Si l’espèce est présente en Europe centrale, son territoire privilégié demeure le pour tour méditerranéen. Elle doit d’ailleurs son nom à la déesse Athéna. «Symbole de malheur chez les Romains, la chouette incarnait à l’inverse la sagesse dans la Grèce antique. Aujourd’hui encore, elle est représentée sur la pièce de 1 euro du pays.»
OISEAU TRÈS SÉDENTAIRE
En Suisse, la chevêche d’Athéna a connu une période prospère jusque dans les an nées 1950, où sa population dépassait les 10 000 individus, contre un peu moins de 350 aujourd’hui. «Le paysage agricole traditionnel où elle était établie, avec ses arbres fruitiers haute tige et ses haies, a peu à peu disparu avec l’avènement du modèle intensif. L’utilisation des pesticides a également joué un rôle dans le déclin du rapace, qui se nourrit principalement de vers et de gros insectes, comme des sauterelles et des hannetons, mais aussi de petits mammifères.» Très sédentaire, cette chouette, dont l’espérance de vie avoisine les six à dix ans, ne peut pas compter sur l’arrivée de nouvelles populations des pays alentour pour venir grossir ses rangs. Les femelles pondent une fois par année et donnent généralement naissance à trois à cinq oisillons qui prendront leur envol après une trentaine de jours. «Mais la mortalité des jeunes est très élevée. Entre les chats, les fouines, les martres et les renards, les prédateurs sont nombreux», relève Pierre-Alain Ravussin. En moyenne, seuls 20% des oiseaux de l’année atteignent ainsi l’âge adulte et peuvent espérer, un jour, assurer à leur tour une descendance à l’espèce.

Aurélie Jaquet
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